Comment lire un article scientifique

Comment lire un article scientifique

Par Dawn Richards et Jim Kempster, avec la contribution d’ambassadeurs de la recherche axée sur le patient de l’IALA des IRSC

Éléments graphiques par Tianna Magel

 

La structure d’un article scientifique est très spécifique, à tel point que la plupart des revues fournissent des instructions détaillant le contenu et les objectifs que doivent comprendre les sections des articles qui leur sont soumis.

Ces articles étant aujourd’hui lus par des personnes apportant une grande diversité de contributions aux équipes de recherche, des patients partenaires ont mis en lumière l’importance d’expliquer leur structure et ce que les lecteurs peuvent attendre de chaque section.

Avec leur contribution, nous avons entrepris de créer le présent document, qui s’adresse à tous types de lecteurs d’articles scientifiques, en suivant la structure d’un article scientifique conventionnel. Plutôt que d’offrir des renseignements sur un projet de recherche, chaque section décrit le contenu que vous retrouveriez dans la section correspondante d’un véritable article. Des ressources complémentaires sont également fournies.

Nous espérons que les prochains paragraphes vous aideront à déconstruire les mythes qui entourent les articles scientifiques et seront utiles à vos travaux!

 

 

Le présent document vise à décrire les différentes sections d’un article scientifique. Nous avons présenté ces sections sous la forme d’un article « fictif » pour expliquer brièvement le type de renseignements se trouvant habituellement dans chacune d’elles. Les revues fournissent aux auteurs des instructions sur les sections qui doivent composer un article scientifique, en fonction de la nature de celui-ci. Par exemple, les sections d’un « commentaire » pourraient légèrement différer de celles d’un « article de recherche originale ». En effet, un commentaire vise à faire part des réflexions d’auteurs sur un sujet donné, sans pour autant mentionner les recherches qu’ils ont effectuées ni les ressources et autres recherches à l’appui de leurs travaux, tandis qu’un article de recherche originale rend compte des recherches que les auteurs ont élaborées et effectuées. L’exemple qui suit illustre les sections qui composent habituellement un article scientifique faisant état de recherches originales, en plus de fournir des conseils sur la façon de les lire.

Titre

Le titre de l’article devrait préciser la nature du sujet traité et contenir des mots-clés pertinents par rapport à celui-ci.

Auteurs et affiliations

L’ordre de présentation des auteurs varie selon le domaine scientifique. En règle générale, la première personne mentionnée est celle qui a rédigé l’article. Dans certains domaines, le dernier auteur mentionné désigne le membre le plus chevronné au sein de l’équipe et responsable de l’ensemble de la recherche. Toutefois, dans d’autres domaines, le nom de cette personne est indiqué à la suite du premier auteur. L’ordre de présentation des noms du premier au dernier auteur témoigne habituellement de l’importance de la contribution de chacun à l’article. Ainsi, plus la contribution d’un auteur est importante, plus son nom se rapprochera de celui du premier auteur.

Lorsque des auteurs travaillent pour un établissement ou une entreprise, on fait mention de ces « affiliations ». Bien que les patients partenaires n’aient pas nécessairement d’affiliations officielles, leur nom est de plus en plus souvent accompagné de la mention d’affiliation « patient auteur ». L’identification officielle de ces auteurs à titre de patients aide à comprendre la science de la paternité d’une publication et à savoir combien de patients contribuent à la rédaction d’articles scientifiques. Les patients auteurs doivent avoir donné leur consentement à cette désignation.

En prenant connaissance des affiliations des auteurs, vous remarquerez que certains établissements universitaires sont mieux connus et respectés que d’autres (à tort ou à raison). Si un établissement ou un organisme vous est inconnu, vous souhaiterez peut-être faire une recherche à son sujet pour en apprendre davantage sur sa mission et son financement.

Les scientifiques et cliniciens qui travaillent dans certains secteurs ou qui collaborent avec eux peuvent également être auteurs d’articles scientifiques, ce qui peut susciter un certain scepticisme chez des lecteurs. Les lecteurs avertis comprendront l’importance d’examiner les intérêts possiblement conflictuels des auteurs (cette question est d’ailleurs abordée à la fin de l’article dans la section « Conflits d’intérêts ») et sauront estimer si des conflits d’intérêts peuvent être à l’origine de biais. Si vous souhaitez en savoir plus sur ce qu’on appelle le biais de publication, voici un article qui pourrait vous intéresser.

Habituellement, l’un des auteurs est désigné comme « l’auteur-ressource ». Il s’agit de la personne à qui on peut envoyer par courriel des questions au sujet de l’article, le cas échéant. Souvent, il s’agit du premier auteur ou de l’auteur le plus chevronné. Il ne faut pas hésiter à communiquer avec l’auteur-ressource pour lui poser des questions ou lui demander une copie de l’article lorsqu’il faudrait autrement payer pour l’obtenir (article protégé par un « verrou d’accès payant »; un article accessible gratuitement est appelé un article en « libre accès »). De nombreux auteurs sont ravis de recevoir directement des messages de la part de lecteurs qui s’intéressent à leurs travaux.

Si vous souhaitez en savoir davantage sur les exigences relatives à la paternité d’un article scientifique, l’International Committee of Medical Journal Editors a publié ici des lignes directrices à ce sujet. Ces lignes directrices ont également été adaptées pour les équipes d’auteurs qui sont composées de patients partenaires..

Résumé

Le résumé peut être considéré comme un sommaire très condensé de l’objet de l’article. Habituellement, les résumés comptent au plus de 250 à 300 mots. Certaines revues exigent un résumé structuré, à savoir qu’il comporte des sections (p. ex. introduction, matériel et méthodes, résultats, etc.). En parcourant le résumé, vous devriez obtenir une bonne idée de la teneur de l’article et pouvoir décider de consacrer ou non le temps nécessaire pour le lire en entier. D’autres lecteurs préfèrent lire l’introduction avant de prendre cette décision. Il n’y a pas de « bonne » approche quant à l’information sur laquelle se fonder pour décider de lire ou non l’article dans sa version intégrale.

Résumé en langage simple

Un résumé en langage simple n’est pas toujours exigé par la revue qui publie l’article, mais s’il l’est, il ne compte habituellement pas plus de 250 à 300 mots. Il doit être rédigé dans un langage accessible au grand public. Son contenu ne doit pas être identique à celui du résumé, mais doit donner un aperçu de l’article facile à lire.

Introduction ou contexte

Cette section aide à établir le contexte du contenu de l’article. On y traite brièvement du domaine de recherche et de la façon dont le projet (ou le groupe de projets) en particulier s’inscrit dans ce domaine. Par exemple, elle devrait aider le lecteur à comprendre le domaine de façon générale, y compris les limites ou le bien-fondé des travaux de recherche effectués. Elle devrait également expliquer en quoi ces travaux permettent de combler des lacunes dans le domaine ou les raisons pour lesquelles la recherche a été effectuée. Cette section peut aussi indiquer ce à quoi le lecteur peut s’attendre dans l’article.

Matériel et méthodes

Cette section est parfois simplement appelée « Méthodes », selon la nature de la recherche dont il est question. Elle décrit avec précision le matériel utilisé et la façon dont la recherche s’est déroulée.

On devrait y trouver suffisamment de détails pour qu’une autre équipe de recherche puisse reproduire les travaux. Dans le cas d’une recherche expérimentale réalisée en laboratoire, cette section décrira par exemple les produits chimiques et les instruments utilisés, ainsi que les mesures obtenues, en plus de fournir d’autres précisions à propos de l’expérience. Dans le cas d’autres types de travaux, elle peut notamment préciser la façon dont une enquête a été élaborée et mise en œuvre, et la façon dont les réponses ont été recueillies et analysées, ou encore dont le travail en groupes de discussion a été réalisé. On pourra également y apprendre comment la recherche a été conçue pour réduire au minimum les risques de biais dans les résultats de la recherche. Si des animaux ont été utilisés dans le cadre de l’étude, si des participants humains ont été mis à contribution ou encore si des échantillons ont été utilisés, des approbations spéciales pourraient devoir être obtenues pour mener à bien la recherche. Ces approbations seraient alors indiquées dans cette section.

Résultats

La section « Résultats » décrit les conclusions de la recherche. Elle se compose souvent de textes, de diagrammes ou de graphiques (parfois appelés figures) et de tableaux qui présentent les données de la recherche. Cette section présente simplement les résultats plutôt que leur mise en contexte dans le domaine de l’étude (une information qui se trouve plutôt dans la section « Discussion »).

La section « Résultats » peut comprendre de l’information sur les chiffres et les statistiques. Par exemple, on peut y indiquer le nombre de personnes qui ont participé à l’étude ou le nombre d’échantillons analysés. Ces chiffres peuvent être importants pour comprendre la signification de ces résultats. Des termes comme « significatif » ou « non significatif » correspondent, en statistique, à une définition précise qu’il importe de garder à l’esprit. Statistique Canada a publié un glossaire qui pourrait être utile pour comprendre les termes utilisés dans le domaine de glossaire.

Parfois, les chercheurs constatent des résultats auxquels ils ne s’attendaient pas, et ceux-ci devraient aussi être rapportés dans cette section.

Dans certains cas, lorsque la revue l’exige, les sections « Résultats » et « Discussion » sont combinées.

Discussion

La section « Discussion » permet de mettre en perspective les résultats de la recherche dans le contexte plus large d’autres travaux effectués dans le domaine. On peut aussi y proposer des interprétations des résultats à la lumière des connaissances déjà acquises dans le domaine en question. Les résultats sont généralement comparés à ceux d’autres travaux publiés sur le même sujet. Cette section devrait donner des pistes concrètes pour expliquer pourquoi les résultats sont semblables à d’autres résultats constatés dans le domaine en cause ou différents de ceux-ci.

On devrait discuter dans cette section de tout résultat imprévu ou difficile à expliquer. Les chercheurs peuvent expliquer ce qu’ils pensent de ces résultats et indiquer que ceux-ci présentent une piste d’enquête pour des recherches futures.

Selon votre relation avec le domaine de recherche ou vos connaissances en la matière, votre interprétation des résultats pourrait même différer de celle des auteurs, car les résultats de la recherche sont parfois fortement tributaires du contexte ou des perspectives. Cette section devrait également décrire les limites de la recherche que les auteurs ont cernées.

Il s’agit en quelque sorte de décrire ce qui circonscrit la portée de la recherche ou les éléments limitatifs connexes. Par exemple, dans le cas de répondants à une enquête issus seulement d’un groupe démographique particulier, on y indiquerait que les résultats ne sont pertinents que pour ce groupe. Autre exemple, si les participantes étaient des femmes adultes de la classe moyenne supérieure, on y indiquerait qu’il est exagéré d’extrapoler ces résultats aux adolescents d’une classe socioéconomique différente. Dans ces cas, les auteurs devraient indiquer qu’il faut approfondir les recherches afin d’inclure d’autres données pour que les résultats puissent être représentatifs d’autres groupes démographiques ou plus largement applicables à l’ensemble des groupes démographiques. Une autre limite pourrait résider dans le fait que seulement 10 personnes ont pu participer à un groupe de discussion en raison du budget. Les auteurs devraient alors le préciser et indiquer en quoi cette limite pourrait avoir une incidence sur les résultats ou sur leur généralisabilité.

Les auteurs pourraient également utiliser cette section pour faire état de leurs réflexions sur les travaux futurs qui devraient être effectués et qui appuieraient davantage ces constatations, les élargiraient, les rendraient plus généralisables ou s’en inspireraient.

Conclusion

La section « Conclusion » ne doit pas nécessairement être longue. Elle sert à renforcer les principales constatations de la recherche et à réitérer la façon dont les auteurs ont comblé un besoin ou une lacune clairement énoncés dans la section « Introduction » de l’article. Dans bien des cas, cette section circonscrit pour le lecteur le message à retenir et souligne les prochaines étapes possibles.

Plusieurs autres sections peuvent s’ajouter à la suite de ces grandes parties pour donner de l’information supplémentaire au sujet de la recherche. Ces sections peuvent varier quelque peu selon la revue, mais en voici quelques-unes qu’on observe souvent.

Accessibilité des données et du matériel

Cette section indique aux autres chercheurs s’ils sont en mesure d’accéder aux données et au matériel produits ou utilisés par les auteurs pour leurs propres travaux. En recherche, la science ouverte est un mouvement qui vise à rendre les données et le matériel plus facilement accessibles aux autres chercheurs du domaine. Cette approche est utile pour faire avancer la recherche en diffusant les résultats et le matériel de façon transparente, de manière à réduire globalement le « gaspillage d’efforts de recherche ». Il peut exister des raisons valables pour lesquelles les données et le matériel ne sont pas mis à la disposition d’autres chercheurs. En pareil cas, ces raisons devraient être énoncées.

Abréviations

On présente parfois à la fin de l’article une liste des abréviations ou acronymes qui y sont utilisés, ainsi que leur signification.

Références

Il s’agit d’une liste de tous les articles scientifiques et des sites Web ou autres ressources auxquels les auteurs se sont reportés pour rédiger leur article. Les intéressés y trouveront un bon point de départ pour explorer à fond des sujets en lien avec l’article.

Voici quelques exemples de la façon dont les références sont présentées :

1. SMITH, John, et coll. «Titre de l’article », Revue, vol., no, mois et année, pages.

2. INSTITUT DE L’APPAREIL LOCOMOTEUR ET DE L’ARTHRITE. «Titre de l’article », Revue, vol., no, mois et année, pages.

Remerciements

Il s’agit de la section où l’on énumère les personnes qui ont contribué à la recherche et peut-être même à l’article, mais qui ne répondaient pas aux critères pour figurer à titre d’auteurs.

Financement

C’est dans cette section que l’on mentionne les bailleurs de fonds, c’est-à-dire les organismes qui ont fourni un soutien financier pour réaliser la recherche. Il peut s’agir d’un organisme de financement ou de charité dans le domaine de la santé, d’une association de patients, d’une organisation philanthropique, d’un établissement du secteur privé ou d’un autre type d’organisation. La source du financement peut être une information importante pour mesurer l’objectivité de la recherche ou cerner les motivations qui la sous-tendent. Par exemple, si la recherche est financée par le secteur privé, vous pourriez avoir des préoccupations au sujet d’un éventuel parti pris ou conflit d’intérêts, ou de la possibilité que les résultats communiqués soient uniquement les résultats « positifs ».

Renseignements sur les auteurs

En règle générale, cette section permet d’indiquer les affiliations des auteurs et de décrire la contribution de chacun d’eux aux travaux (p. ex. s’ils ont conçu la recherche, l’ont réalisée, s’ils ont contribué à l’article, etc.). Parfois, on inscrit simplement les initiales des auteurs dans cette section.

Déclaration relative à l’éthique

Bien que l’approbation en matière d’éthique soit habituellement indiquée dans le corps de l’article, cette section permet de préciser si elle était requise ou non pour réaliser les travaux de recherche. En règle générale, une recherche qui mobilise des participants humains nécessite un examen éthique de la recherche. Si aucune approbation à cet égard n’était exigée pour réaliser les travaux, ou si une « exemption » a été reçue d’un comité d’éthique de la recherche, ces précisions sont indiquées dans cette section. Un document d’exemption fourni par un comité d’éthique signifie que l’équipe de recherche a été autorisée à mener les travaux sans avoir obtenu le consentement éclairé des participants. Il existe des situations où le consentement n’est pas exigé formellement; par exemple, si le comité d’éthique estime que la recherche présente un risque minimal pour les participants ou si l’obtention du consentement éclairé n’est pas réalisable pour diverses raisons.

Consentement à la publication

Cette section va de pair avec la déclaration relative à l’éthique. En règle générale, lorsque les données des participants humains font partie de la recherche, ceux-ci consentent à ce que les résultats soient utilisés dans une publication. Dans certains cas, le consentement des participants n’est pas obtenu, et une exemption est accordée par un comité d’éthique de la recherche. La situation serait expliquée dans cette section et dans celle sur la déclaration relative à l’éthique.

Conflits d’intérêts

Tous les conflits d’intérêts potentiels sont décrits dans cette section. Il peut s’agir de conflits d’intérêts réels ou perçus qui pourraient créer un biais. Par exemple, si un auteur a accepté du financement du secteur privé pour le travail présenté ou pour d’autres travaux qu’il a réalisés, il le déclarerait dans cette section. Tous les auteurs, y compris les patients auteurs, doivent déclarer tout conflit d’intérêts.

Documents supplémentaires

C’est dans cette section que l’on mentionne les fichiers ou les données qui peuvent être téléchargés ou demandés par le lecteur. Il peut s’agir d’articles ou de documents utiles, mais qui ne se trouvent pas dans le corps de l’article de recherche. Par exemple, ce dernier peut inclure une partie des données de la recherche sous forme de tableau, sans toutefois comprendre l’ensemble des données ou des tableaux pour ne pas trop alourdir le texte; cette information pourrait alors être présentée dans cette section. On pourrait également trouver dans cette section le texte complet d’une enquête dont les résultats sont résumés dans l’article, par exemple.