Entrevue avec Candace Ramjohn, par Melody Choi
Pour Candace Ramjohn, qui se définit comme une « alchimiste visuelle », les médias visuels ne sont pas seulement un outil de représentation, mais une langue, un pont et un moyen de transformation. Ses expériences en réflexion conceptuelle, en pensée systémique, en communications et en arts traditionnels ont enrichi son travail de diverses perspectives. En tant que spécialiste de la mobilisation des connaissances (MC) pour l’Unité de soutien de la SRAP de l’Alberta, Candace fonde en grande partie son approche sur ses expériences personnelles, où elle a dû – tant comme patiente que comme membre de la famille – se frayer un chemin dans l’univers complexe de la santé. Dans cette entrevue, elle nous dévoile le processus créatif derrière les enregistrements graphiques qu’elle a créés pour la conférence PxP 2024 (par les patients, pour les patients) et revisite la manière dont les médias visuels peuvent transformer la mobilisation des patients dans la recherche.
Pourquoi les médias visuels sont-ils importants pour la mobilisation des patients?
Situés à l’intersection de l’art et de la science, les médias visuels sont pour moi une façon importante de participer au monde qui m’entoure. Je considère mes talents artistiques comme une véritable partie de mon identité, quelque chose qui me permet de changer la donne dans un domaine qui me concerne personnellement. En tant que fervente défenderesse des approches qualitatives et centrées sur la personne dans la recherche en santé, je crois que, bien que la rigueur scientifique et les méthodes quantitatives universitaires traditionnelles soient précieuses, elles peuvent parfois faire de l’ombre aux riches expériences humaines qui se trouvent au cœur du parcours des patients. Les récits visuels sont une manière de combler ces lacunes. Je crois que les « approches centrées sur la personne sont essentielles aux changements de culture » : les médias visuels sont une manière accessible et motivante de comprendre l’expérience des patients et de rejoindre des personnes de tous les horizons.
Pourriez-vous nous décrire certains des choix créatifs que vous avez faits lors de la conceptualisation de ce projet?
Lors de la conception de mon œuvre, il m’a été difficile de m’assurer de rendre la vaste diversité des expériences des patients tout en maintenant l’authenticité. L’un des plus grands défis auxquels j’ai dû faire face était de m’assurer que le produit final allait se démarquer tout en respectant le thème et en y restant fidèle. Je me suis demandé : « Quel média artistique serait le plus parlant pour ces personnes? Comment pourrais-je réellement faire honneur à l’essence du récit de chaque patient? » Ces questions ont servi à orienter la direction artistique que j’ai prise.
En tant qu’artiste, je me laisse généralement guider par les formes d’art tactiles et organiques qui impliquent les sens, mais j’ai compris que les outils numériques étaient nécessaires à l’accessibilité. Toutefois, l’un des avantages de s’identifier comme « alchimiste visuelle » est de laisser les circonstances et la portée de chaque nouveau projet décider de mon rythme artistique. J’ai finalement décidé de me tourner vers l’illustration graphique et l’aérographie, en évitant volontairement les représentations trop abstraites ou surréalistes. En trouvant le juste milieu entre la représentation réaliste et l’art du roman graphique, mon objectif était de dépeindre chaque personne comme le héros de sa propre histoire.
Y a-t-il une citation ou une séance qui vous a particulièrement frappée? Pourquoi cela vous touchait-il sur le plan artistique ou personnel?
Toutes les séances ont été révélatrices pour moi. J’ai pu constater que chaque expérience est unique. Le courage dont faisaient preuve ces personnes qui racontaient leur histoire m’a profondément marquée. Cela dit, une citation que j’ai trouvé particulièrement inspirante est celle de David Gilbert : « Nous sommes tous des praticiens expérientiels ». Cette idée – que nous ne sommes pas seulement définis par notre état de santé, mais également par les connaissances professionnelles que nous apportent les expériences de la vie – a renforcé mon intention de dépeindre les patients comme des personnes à part entière et non seulement comme porteuses d’un diagnostic.
En repensant à mes propres expériences comme patiente et comme aidante naturelle, j’ai réalisé à quel point ces rencontres avaient façonné mon approche artistique. Elles m’ont permis d’acquérir une profonde empathie pour l’être humain et m’ont encouragée à trouver d’autres occasions de travail axé sur les patients. Mes expériences personnelles m’ont aussi donné les moyens d’utiliser mon art pour donner une voix aux autres.
Qu’avez-vous trouvé le plus difficile dans l’illustration des connaissances et des expériences des présentateurs?
Mon plus grand défi dans ce projet était de rendre justice à la vaste diversité des histoires que les patients avaient à raconter. Consciente des valeurs que mon œuvre se devait de véhiculer, j’ai tenu compte des sensibilités culturelles, de l’équité, de la diversité et de l’accessibilité. Par exemple, j’ai veillé à ce que les images et le texte soient d’une taille appropriée, et j’ai volontairement créé suffisamment de contrastes de couleur et d’opacité pour que chaque élément puisse être distingué plus facilement. De plus, tous les présentateurs de la conférence ont reçu un échantillon de mes images et ont pu demander des modifications à leur représentation visuelle ou aux mots. Cette collaboration était essentielle pour que tout le monde puisse se sentir vu, à l’aise et représenté de façon adéquate.